Face à l'iPhone 6S, le Fairphone 2 se bat contre l'obsolescence programmée

La valse des iPhone et des Samsung que l'on vous enjoint de renouveler chaque année vous énerve? Fairphone offre une alternative originale, avec un smartphone réparable à l'envi, conçu pour durer.

Mercredi, Apple a dévoilé son iPhone 6S. Après cette keynote et l'IFA de Berlin, les consommateurs ont l'embarras du choix parmi les nouveaux gadgets en lice pour Noël. Mais si vous voulez être vraiment original, si vous vous passionnez pour la Cop21, et qu'en plus vous avez un goût pour le do it yourself, oubliez tout cela. Bas van Abel, patron de la société néerlandaise Fairphone, a pensé à vous avec un smartphone "équitable", le Fairphone 2. L'antidote à l'obsolescence programmée.  

Après le succès d'estime du premier modèle, sorti en 2014 et écoulé à 60000 exemplaires, Fairphone propose pour cette fin d'année un nouveau téléphone entièrement modulable et davantage en phase avec les standards du moment. Le Fairphone 2, qui sera présenté au London Design Festival du 25 au 27 septembre, sera livré à partir de novembre. 

 

Un smartphone comparable aux standards du marché

Le Fairphone - qui signifie en anglais "téléphone équitable" - est né d'un double constat: du côté de la production, l'industrie vit sur l'exploitation des ressources rares et des ouvriers chinois. Du côté de la consommation, l'obsolescence accélérée et un marketing irraisonné poussent à changer de téléphone tous les deux ans en moyenne, alors que cela ne correspond pas à un besoin. Ce que vient appuyer un sondage Opinion Way d'août 2015, montrant que 81% des Français trouvent injustifiée la fréquence de renouvellement proposée par les constructeurs. Le Fairphone est donc conçu pour être fabriqué de la manière plus équitable, et "consommé" de manière responsable: en durant le plus longtemps possible. 

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Sur le plan du design, le Fairphone 2 ressemble à n'importe quel smartphone actuel, avec son écran FullHD de taille confortable (5") sans être géant, un bouton pour la photo, et un bouton pour régler le volume sonore. Sous le capot, ce téléphone équipé d'Android 5.1 et d'un processeur quadricoeur Snapdragon ne possède pas toutes les technologies dernier cri (NFC, chargeur sans fil), mais il est évolutif. On peut le comparer avec un smartphone haut de gamme de l'année dernière, par exemple un Samsung Galaxy S5, légèrement plus épais et plus lourd. Plus cher aussi: le Fairphone 2 est en précommande à 525 euros, quand le S5 se trouve aujourd'hui à moins de 400 euros. 

Plus durable, plus équitable

 

Alors que paye-t-on ? Sa durée de vie, tout d'abord. A long terme, le téléphone est économique. Tous ses modules (écran, boîtier, batterie) peuvent être changés séparément. Appareil photo, micro, haut-parleur, vibrateur sont séparés du reste de la plateforme et intégrés dans des compartiments facilement remplaçables (un simple tournevis suffit). Fairphone vendra les modules, et iFixit les composants. La coque du téléphone (qui existe en matériaux recyclés) est robuste (bumper intégré) et solidaire du boîtier (pas besoin d'acheter une coque de protection).  

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En deuxième lieu, on paye les matériaux et l'assemblage, correspondant à des standards sociaux et environnementaux supérieurs à la moyenne. Enfin, petit plus de ce smartphone: il possède deux emplacements de carte SIM. Ce qui est rare parmi les téléphones les plus vendus en France, et pratique pour avoir un seul téléphone et deux numéros (ou deux opérateurs). 

Les leçons de l'expérience Fairphone 1 ont été tirées

La recette du Fairphone 1, qui a plutôt bien fonctionné - les 25 000 pré-commandes du Fairphone 1 avaient suffi à préfinancer sa production - a été améliorée. Le premier modèle, de conception chinoise (Fairphone avait juste changé certains composants), était trop basique et trop geek pour être vendu par les grands opérateurs. "Comme l'OS était rooté (version d'Android 100% modifiable par l'utilisateur, ndlr), on ne pouvait pas garantir la sécurité et nous n'avions pas les ressources suffisantes pour assurer le support technique. Nous n'étions pas capables non plus d'assurer un approvisionnement en continu. Nous le serons avec le Fairphone 2", déclare à L'Express Olivier Hebert, qui a supervisé pour Fairphone la conception interne du nouveau modèle (le design industriel, lui, a été réalisé par un partenaire londonien). Fairphone n'a pas encore de distributeur en France - la vente se fait uniquement par internet -, mais l'entreprise discute avec Orange. 

La société compte ainsi élargir sa clientèle. Qui étaient les acheteurs du premier Fairphone ? "L'acheteur moyen est un Allemand de 38 ans, bac +5, dont le revenu disponible est supérieur à la moyenne", décrit Olivier Hebert. Une partie de la clientèle est clairement bobo, mais ce n'est pas la totalité. Parmi les acheteurs, il y a avait ainsi toute une partie de clients qui n'avaient jamais eu de smartphone.  

"Nous voudrions qu'il y ait sur le marché le moins de téléphones possible"

Elargir sa clientèle, toutefois, ne signifie pas la même chose pour Fairphone que pour une entreprise traditionnelle. "Notre objectif n'est pas de vendre le plus de téléphones possible, nous explique le fondateur de l'entreprise, Bas van Abel. En fait, nous voudrions qu'il y ait sur le marché le moins de téléphones possible ! Le but de l'entreprise est d'avoir un impact social et sociétal, pas de faire le maximum de bénéfices." 

Avec un tel discours, difficile de convaincre des investisseurs. Ça tombe bien, l'un des piliers de Fairphone est son indépendance financière. Elle ne lance la production d'un modèle que si son objectif de précommandes est rempli. Fin août, elle était aux deux tiers de son objectif (15.000) pour le Fairphone 2. L'entreprise a été financée au lancement par des ONG et des investisseurs privés. Elle a également obtenu un prêt bancaire de 2,5 millions d'euros. Tous les salariés (une quarantaine) sont actionnaires. 

"Ma façon de changer les choses, c'est d'en fabriquer"

Bas van Abel a créé la société début 2013, à la suite d'une expérience dans une ONG pour laquelle il travaillait sur la question de l'extraction de minerais (étain, tantale...) dans les zones de conflits. Il se forge alors la conviction que la sensibilisation, seule, n'est pas efficace. "Je me suis dit: 'OK, ce qui se passe au Congo est vraiment triste, mais malheureusement il n'y a pas vraiment de solution.' C'est pourquoi le seul moyen de faire avancer les choses, c'est du concret : ne plus s'approvisionner dans ces zones", raconte le Néerlandais.  

Adepte de la culture "Maker", il s'attaque donc à l'ensemble de la chaîne de valeur de l'industrie du mobile. "Ma façon de changer les choses, c'est d'en fabriquer", résume-t-il. Pour le Fairphone 2, l'entreprise fait produire ses smartphones en Chine par HiP, un sous-traitant singapourien. En collaboration avec HiP, elle est en train de créer un fonds pour le bien-être des ouvriers. Bien sûr, tout n'est pas rose. "Les employés travaillent 66 heures par semaine, alors que la loi limite le temps de travail à 60 heures. On leur a demandé de passer à 60, ce qu'ils vont faire car ils veulent montrer qu'ils sont différents", précise Olivier Hebert. 

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Photo prise pendant un voyage d'études sur le recyclage des déchets électroniques au Ghana, financé par les ventes du Fairphone 1. Ici, une décharge de chargeurs.

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Les bénéfices sont réinvestis dans la chaîne d'approvisionnement, les équipes sur le terrain, différents programmes de recyclage des déchets ou d'évaluation sociale, et dans le design du prochain Fairphone, que Bas van Abel promet "encore plus disruptif".  

Ce nouveau smartphone séduira-t-il les Français ? Pour l'instant, plus que le premier. La France, qui a représenté moins de 10% des ventes du premier modèle, est le 3e pays dans les précommandes du Fairphone 2. Un reportage de Cash Investigation, et un prix à Futur en Seine, ont aidé le smartphone à se faire un nom dans l'Hexagone.

Source : http://www.commentreparer.com/  http://lexpansion.lexpress.fr

 

Date de dernière mise à jour : vendredi, 02 juillet 2021

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